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Blog consacré à l'écriture, mes projets, ce qui occupe mon esprit en général


Grim - Chapitre 3

Publié par Jia sur 7 Août 2015, 22:25pm

Catégories : #Histoires

Grim - Chapitre 3

Trois…

Grim avait toujours fait partie de la vie d’Ophélia. Il avait été placé dans le berceau de l’enfant dès sa naissance et ne l’avait plus quittée depuis. Les deux s’étaient tout de suite plu. Pourtant, il était franchement effrayant.

Il mesurait une petite trentaine de centimètres et avait la forme d’un ourson. Autrefois élégamment vêtu, il ne lui restait aujourd’hui que son vieux short de marin. Ophélia avait un jour décrété qu’il était un pirate, aussi lorsqu’il avait perdu l’un de ses yeux, elle lui avait fabriqué un bandeau noir qui lui donnait l’air d’un vieux loup de mer. Les années passant, l’ourson avait également perdu la moitié d’une oreille et était devenu tout ratatiné.

En dépit de tout cela, il avait été jusqu'à présent un doudou des plus normaux. Mais cette nuit-là, Ophélia avait l’impression de le voir pour la première fois. Elle le regarda bouche bée se mettre sur ses deux pattes et descendre du lit pour aller voir si d’autres monstres se dissimulaient dans la chambre.

  • On dirait qu’il est venu seul, chuchota Grim d’une voix rauque.

Il parlait vraiment comme un pirate ; Ophélia ne s’était pas trompée. L’ourson revint vers elle, « tu dois te poser des tas de questions » dit-il.

Ophélia en avait des milliers, voire des millions, mais elle réussit à n’en articuler aucune.

  • Rien ? Tant mieux, on a beaucoup de choses à faire, toi et moi, avant que le soleil ne se lève.

L’air de rien, Grim alla ouvrir les tiroirs du bureau et farfouilla à l’intérieur. Ophélia l’entendit grommeler en ne trouvant pas ce qu’il cherchait. Puis, une exclamation de victoire retentit dans la chambre.

  • Enfin !

L’ourson-pirate brandit un petit sabre en plastique. L’objet devait mesurer la taille d’un couteau de cuisine et se terminait par une poignée dorée. Ophélia s'en souvenait ; elle l'avait reçu dans un chapeau surprise il y a plusieurs mois de cela à un anniversaire organisé par l'une de ses copines.

  • Ce n’est pas une vraie épée, se sentit-elle obligée d’intervenir.

  • Ici non, mais « là-bas », ce sera une arme redoutable, fais-moi confiance !

La petite ne savait quoi répondre à cela. Médusée, elle regarda sa peluche attacher le sabre à son short à l’aide d’une ceinture en toile qui traînait par-là.

  • Enfile tes chaussures, il faut qu’on y aille.

Ophélia ne tenait plus, elle ne savait que penser de tout cela.

  • Comment ça se fait que tu parles ? C’était quoi cette créature ? Où est-ce qu’on va ?...

  • Eh bien, tu avais des questions finalement !

  • Je veux juste comprendre.

Grim broncha un peu, il fallait qu’ils se dépêchent. Néanmoins, elle avait le droit de savoir. Il prit un temps de pause avant de commencer son récit.

  • Je suis la même peluche que tu as toujours connu. Chaque fois qu’un enfant donne son cœur à un doudou comme moi, nous devenons des sortes de gardiens. La nuit, les cauchemars rodent ; ils sont attirés par l’innocence et la crédulité des enfants. C’est notre devoir de les repousser. Je ne sais pas pourquoi, mais dans cette maison, les ombres sont particulièrement puissantes. Cela fait plusieurs années que je les combats sans relâche, mais elles gagnent du terrain et quelque chose me dit que tout se finira cette nuit. J’ai besoin de ton aide pour gagner cette bataille. Je n’y arriverai pas seul.

  • C’est la première fois que j’en vois… Pourquoi est-ce qu'il a disparu ?

  • Ils s’enhardissent, ils sentent qu’ils sont sur le point de l’emporter... C'est la peur que l'on accorde aux cauchemars qui les rend réels ; en me serrant contre toi, tu t'es sentie rassurée. Cela suffit à faire fuir les moins puissants d'entre eux.

  • Il y en a d'autres ?

  • Oh oui, il y en a beaucoup d’autres, répondit Grim en levant les bras au ciel.

  • Celui-là était flou...

  • Ils n’ont pas l’habitude d’essayer de prendre une vraie forme dans ce monde. La plupart du temps ils restent invisibles et perturbent les rêves des enfants.

Ophélia avait besoin de quelques secondes pour assimiler tout ça. Grim les lui laissa et alla chercher les bottines de la petite.

  • Pourquoi est-ce que tu n’avais jamais parlé avant ?

  • Ce n’est pas notre rôle. Il ne faut pas empêcher l’enfant de grandir.

  • Comment ça ?

  • On devient adulte lorsque l’on cesse de croire à la réalité des rêves ; le rôle des gardiens est de faire en sorte que l’enfant ne ressente pas trop la puissance des cauchemars et poursuive sa vie comme si de rien n’était.

  • Certaines de mes copines ont jeté leur doudou… Elles disent que c’est pour les bébés.

Grim inspira à fond.

  • C’est le cycle naturel de la vie. Si elles n’ont plus besoin de leur gardien, c’est que les cauchemars ne sont pas très puissants, et c’est tant mieux.

Il déposa les chaussures d’Ophélia juste devant elle. La petite les regarda fixement. Son doudou n'espérait tout de même pas qu'elle le suive « comme ça » ?

  • Où est-ce que tu m’emmènes ?

  • C’est toi qui va décider de la destination, tout dépend de toi. Les cauchemars sont liés à toi et à cette maison, il faut découvrir pourquoi.

  • D'accord, mais si jamais ils gagnent, qu’est-ce qu’il se passera ?

  • J’imagine que tu ne parviendras plus jamais à ressentir la moindre joie. Ils se dissimuleront dans les coins de ta tête. Tu auras peur jusqu’à la fin de tes jours.

  • C’est rassurant… Et mon papa, il pourrait nous aider ?

  • Les adultes ne voient pas les cauchemars. Il va croire que tu as rêvé et te dire d’aller te recoucher.

Après un instant de réflexion, Ophélia enfila ses bottines ; Grim avait l’air de savoir ce qu’il disait. L’ourson faisait les cent pas dans la pièce en quête d’autre objets utiles pour le voyage. Malgré la gravité de la situation, il évoluait avec aisance dans la chambre, étudiant rapidement les crayons et autres bricoles.

  • Et moi, je vais avoir besoin d’une arme ?

  • Non, c’est mon rôle de te protéger. Toi, tu dois nous guider.

  • Mais je ne sais pas où, protesta la petite fille.

  • A ton avis ?

Ophélia jeta instinctivement un regard vers la fresque aux coquelicots. La peinture était figée, mais la fixer c’était comme être appelé par le vide au bord d’une falaise.

  • Tu as toujours senti que quelque chose clochait avec ça… murmura Grim.

  • Toujours…

Grim était prêt à partir. Il avait pris avec lui une poignée de crayons qu’il avait fourré dans une trousse, elle-même attachée à sa ceinture. Ophélia hésitait encore, tout cela semblait trop incroyable. Elle devait être endormie et imaginer toute la scène. Son doudou devina ses pensées ; il lui tendit la main.

  • Il faut y aller. Tu ne risques rien, je te le jure.

Ophélia acquiesça. Après tout, elle avait toujours accordé son cœur à l’ourson et il n’y avait pas de raisons pour que cela change.

  • Très bien, allons-y.

L’enfant avança de quelques pas en direction de la fresque. Maintenant qu’elle y regardait de plus près, les coquelicots remuaient faiblement, presque paisiblement.

  • Ne t’y fies pas ; une fois de l’autre côté, ce sera tout autre chose, avertit Grim.

  • Je n’ai pas peur, tu es avec moi.

Les deux amis se prirent la main et franchir le portail.

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